... vive le pape !
Que le successeur de Pierre renonce à sa charge volontairement, en pleine liberté, emporte des conséquences qu’on n’a pas fini d’apprécier et qui ne se liront clairement qu’au regard de l’Histoire à écrire.
Une première chose m’apparaît : le passage d’un pape à l’autre ne va plus être ce couloir sombre et solennel, ponctué de musiques tristes et de veillées aux bougies sur la place Saint-Pierre, tunnel qui conduisait des obsèques internationales du pape défunt, urbi et orbi, jusqu’à la lumière de la fumée blanche envolée dans le ciel romain. J’ai connu la mort de Pie XII, de Jean XXIII (1963, annus horribilis), de Paul VI, de Jean Paul Ier, de Jean Paul II. Benoît XVI, redevenu Frère Joseph, humble moine d’une communauté, s’endormira loin du vacarme médiatique qui entoure le Vatican lorsqu’un pape meurt « en fonction ». Le pape n’est pas mort, vive le pape !
Du coup, cette succession va s’opérer moins dramatiquement, sans mise en scène doloriste, comme pour n’importe quelle institution humaine. Ce pape, sans doute le premier à avoir cité Nietzsche dans une encyclique, ne se prend définitivement pas pour un surhomme. Paradoxalement, parce que la mort n’y aura pas imprimé sa marque, la continuité du siège papal n’en sera que mieux soulignée. Le relais va être transmis entre deux coureurs bien vivants, l’un un peu essoufflé mais qui n’a jamais lâché le témoin et « achève sa course » (2 Tm 4,7) et l’autre déjà mystérieusement préparé à prendre la suite et à courir lui aussi sous les couleurs régénérées de l’Eglise catholique.
Benoît XVI ne « démissionne » pas, car il n’a jamais été un pape démissionnaire. D’autres que moi ont déjà montré combien il avait été au contraire le ferme artisan non pas d’une Réaction mais d’une nouvelle contre-culture catholique, autre nom « moderne » d’une bonne nouvelle à jamais sel de la Terre et lumière du monde.
Je ne regretterai qu’une chose : qu’après ses deux encycliques sur l’amour et l’espérance, Benoît XVI n’ait pas bouclé sa « trilogie » en cette année de la foi qu’il avait désiré nous faire vivre. Mais qui sait ? Une autre divine surprise nous attend peut-être d’ici au 28 février 2013, 20 h…