Rome, printemps 2008
En 2007-2008, je suis animateur au sein de l'aumônerie des lycées de l'enseignement public du centre d'Orléans, baptisée Sichem. La responsable de l'aumônerie est Claire Urfels, qui entrera quelques année plus tard dans les ordres, bénédictine au monastère de Bouzy-la-Forêt (45) sous le nom de sœur Elisabeth de la Trinité. Notre aumônier est le père Gilbert Bonnemort.
Nous nous sommes associés avec une autre aumônerie, Képhas, dont la responsable est Isabelle Fouché, accompagnée par le père Richard Mention, pour emmener nos jeunes en pèlerinage à Rome. Le père Olivier de Scitivaux, bon connaisseur de la ville romaine et ancien aumônier de Sichem, est notre guide.
Le texte qui suit est mon journal de pèlerin.
***
Dimanche 13 avril 2008 : le départ d'Orléans.
Sous un ciel maussade,
nous avons rendez-vous à Saint-Dominique à 13 h. Xavier et
Françoise [Poisson] sont passés me prendre à la maison avec ma
fille Constance. A l’entrée de l’église, c’est une joyeuse
effervescence. On se salue, chacun reçoit son « livret du
pèlerin » qui va être notre « guide vert »
pendant tout le voyage. Programme détaillé de chaque journée,
chants religieux et chants profanes, présentation de la Ville
éternelle, tout y est prévu, par les soins de Kephas (merci à
Isabelle and C° !).
Nous sommes accueillis
sous la « tente » par le père Olivier de Scitivaux qui
conduit la cérémonie d’envoi en compagnie du père Gilbert
Bonnemort, prêtre accompagnateur de Sichem et du père Richard
Mention, qui lui, accompagne Képhas. Lectures, chants, homélie nous
mettent déjà dans l’ambiance du pèlerinage dont chaque journée
sera placée sous le signe d’un sacrement. A l’issue de notre
rassemblement, les animateurs sont invités à monter à l’autel
pour remettre à chacune et chacun ses insignes de pèlerin, qui
l’accompagneront toute la semaine : une petite croix de bois
attachée à une cordelette blanche et un foulard de couleur ocre
« poché » aux armes, réunies pour la
circonstance, de Kephas et de Sichem. Ainsi adoubés, nous sortons
sur la place de l’église, bavardant en attendant l’arrivée des
autocars. Et c’est l’heure des adieux et de l’embarquement.
Chaque autocar a reçu un nom : « Paul » emmène
Sichem et les pèlerins adultes, « Pierre » le groupe des
jeunes de Kephas, plus nombreux. Au total, nous sommes 96 à faire
le voyage. Et c’est parti… pour une vingtaine d’heures de car
en perspective ! Les uns lisent, les autres bavardent, quelques
écouteurs pointent l’oreille, pour une musique souvent partagée
entre voisin/voisine. Sur l’autoroute, je sortirai ma guitare de
son étui pour faire chanter la troupe. Progressivement, nous nous
enfonçons dans la nuit et dans nos fauteuils, vaguement somnolents
ou franchement endormis pour certains. Chaque arrêt nous extrait de
notre torpeur et de notre autocar, sur des aires d’autoroute ou
dans des stations-service. Avant de repartir, nous recomptons
soigneusement les passagers… Nous passons en Italie par le tunnel
de Fréjus. La partie nocturne de notre voyage ressemblera d’ailleurs
à un long tunnel jusqu’au matin…
Lundi 14 avril :
l’Eglise, sacrement du salut.
Le jour s’est levé
après la longue nuit passée en car, ponctuée par des arrêts
réguliers, toutes les deux ou trois heures, qui nous ont permis de
nous déplier et de satisfaire quelques besoins naturels comme par
exemple prendre, à moitié endormi, un infect café soluble à 1
euro, brutalement insolé par les néons d’une station-service.
Nous atteignons enfin les faubourgs de Rome et contournons la ville
par son « boulevard périphérique » pour entrer par le
Sud et le quartier dit de l’EUR, l’Exposition universelle de Rome
prévue pour 1942 et mise en chantier sous Mussolini, avant guerre.
Nous arrivons enfin vers 11 h à la Pensionata. Une plaque posée sur
sa façade nous informe qu’il s’agit d’une possession et même
d’un territoire du Saint-Siège. Nos chambres n’étant
disponibles qu’à partir de 14 h 30, nous entassons nos bagages
dans une pièce et rallions l’esplanade qui jouxte la basilique
majeure S. Paolo fuori le Mura, Saint-Paul-hors-les-Murs. Là, assis
dans l’herbe, nous attaquons le pique-nique prévu par Képhas. Un
beau soleil nous accueille. Quelques « Roms » qui nous
ont vu arriver eux aussi tournent autour des groupes pour réclamer
argent et nourriture, avec le ton geignard de commande, qui émeut ou
agace, c’est selon. Les plus jeunes ont bon cœur. Une partie du
pique-nique nourrira donc ces premiers pauvres rencontrés à Rome.
En attendant que l’hôtel
puisse nous recevoir, nous entrons dans Saint-Paul, après être
passé par son grand atrium carré. Choc de la première basilique
majeure visitée, avec son immense nef centrale, d’autant plus
immense qu’elle est vide de sièges, et ses quatre autres nefs
latérales, séparées et soutenues par 80 colonnes de granit. Nous
apprenons qu’une plaque de marbre gravée au nom de l’apôtre est
placée sous le maître-autel et atteste de l’emplacement de son
tombeau depuis le IVème siècle. Olivier inaugure les fonctions de
guide qu’il va exercer tout au long de la semaine avec patience et
compétence, nous introduisant inlassablement aux origines de la
chrétienté et aux sources de notre foi. Un cloître jouxte la
basilique. Chacune de ses colonnettes torsadées, décorées de
fragments de mosaïque rehaussés d’or, semble unique.
L’heure tourne. Nous
revenons à la Pensionata pour prendre possession de nos chambres, y
déposer nos bagages et pour certains, récupérer un peu de la nuit
en autocar, qui fut courte et hachée. A 17 h, nous allons vivre
notre première messe à S. Paolo. Lorsque nous arrivons, des scouts,
disposés en carré, écoutent la promesse d’un des leurs. Nous
attendons qu’ils en terminent et nous nous installons face à
l’abside ornée d’une superbe mosaïque du XIIIème siècle.
Nous en verrons d’autres tout au long de la semaine et ne nous en
lasserons pas. J’ai amené ma guitare pour accompagner les chants
avec Claire ; nous croyons au début pouvoir nous passer du
micro mais le son de mon instrument se perd dans l’immense église
et la sanction est immédiate : tout le monde chante un ton en
dessous. Je renonce à jouer et nous finirons la messe a capella.
Le repas du soir est
copieux et commence par un plat de pasta copieusement garni de sauce
tomate et de fromage râpé. Nous sommes bien en Italie…
La veillée préparée
par Képhas vise à faire se rencontrer un peu aléatoirement les
pèlerins par groupe de trois, chacun devant dresser une sorte
de portrait chinois de son voisin. Dans la salle à manger qui nous
réunit, c’est une joyeuse cohue entre tables et chaises pour
retrouver d’abord celui dont la fiche porte le même numéro puis
l’interroger sur ses goûts et ses couleurs… Trois trios sont
tirés au sort et doivent se présenter en public. L’opération
« communication » est réussie.
Toute la troupe est
expédiée au lit. Il s’agit de récupérer de la nuit précédente
pour être en forme le lendemain matin.
Mardi 15 avril : Le
baptême
Nous entamons notre
deuxième journée romaine. En fait, la première complète :
nous découvrons donc le réveil téléphoné à 7 h, la salle du
petit déjeuner, la distribution de ce qui sera l’invariable ( !)
pique-nique du jour, composé de deux petits pains sandwiches de
prosciutto et de fromage, une barre de céréales, une bouteille
d’eau et un fruit, clémentine ou orange. Et hop, tout le monde
dans les autocars. Sichem s’est réparti en deux équipes de 10 et
9, baptisées sur le tas « Capitole » et « Palatin ».
Capitole est confiée à Marie-Agnès et moi, tandis que François et
Xavier conduisent Palatin. Claire et Gilbert accompagneront tantôt
l’une tantôt l’autre. Kephas s’est scindé en cinq équipes,
avec Richard, leur aumônier, Isabelle, Frédérique,…tandis
qu’Olivier prend en charge le groupe des adultes. Rome grisaille
mais nous n’aurons que quelques gouttes de pluie, entre deux
églises. Direction Basilica S. Clemente, du nom d’un des premiers
successeurs de Pierre, connu notamment pour sa lettre aux
Corinthiens. Nous passons devant le Colisée et sommes déposés à
côté de la villa Celimontana. Nous partons en direction de S.
Clemente, tout proche. Première expérience de cheminement de notre
groupe qui s’allonge sur les trottoirs étroits de Rome et traverse
interminablement les rues devant des automobilistes romains plutôt
patients.
S. Clemente est une des
plus anciennes églises de Rome, bâtie sur une domus particulière.
Il y a en fait trois niveaux que nous allons explorer sous la
conduite d’Olivier. La basilique supérieure renferme en son abside
une superbe mosaïque du 12ème siècle. La croix relie la
terre au ciel et douze colombes y figurent les douze apôtres. Nous
descendons dans la basilique inférieure, du IVème siècle. Une
fresque relate le martyre de Clément, qui, selon la tradition, fut
attaché à une ancre et noyé par la marée montante. Le troisième
niveau recèle un petit temple où l’on célébrait le culte au
dieu Mithra, reconnaissable, sur une sculpture en bas-relief, à son
bonnet phrygien. Le néophyte était arrosé par le sang des bovins
sacrifié à l’étage au-dessus, sorte de baptême. Après cette
première descente impressionnante dans le passé chrétien et
pré-chrétien, nous quittons S. Clemente pour nous rendre à St Jean
de Latran.
Nous commençons par
visiter le baptistère, fondé par Constantin et où tous les
premiers chrétiens de l’empire furent baptisés. Olivier nous
explique le rituel de l’époque : hommes et femmes, après
s’être déshabillés, étaient immergés complètement à trois
reprises, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, mourant et
renaissant ainsi, de façon symbolique, à la vie nouvelle en Christ.
De façon insolite, mon portable se met soudain à vibrer et sonner :
c’est l’Insee et c’est un étrange rappel pour moi qui suis à
1500 km de Paris et déjà à des siècles du temps présent.
St Jean de Latran est une
des quatre « basiliques majeures ». C’est aussi la
cathédrale de l’évêque de Rome et le président de la République
française fait partie de son chapitre. Il a donc le titre de
« chanoine de Latran ». Nous avons entrevu à la
télévision, quelques semaines auparavant, les cérémonies
d’intronisation de M. Sarkozy. La grande nef de la basilique est
présentement vide de toute chaise, comme le sont quasiment toutes
les églises « touristiques » de Rome. L’église est
décorée de façon impressionnante, chacun des douze apôtres ayant
droit à une énorme statue blanche, qui se détache d’une alvéole
ceinte de marbre gris, insérée entre deux piliers. Après une
visite succincte, nous nous installons vers 11 h dans une chapelle
latérale fermée pour y célébrer la messe. Nous sommes assis dans
des stalles, tels de bons chanoines.
Après la messe, nous
pique-niquons sur le parvis de l’église et dans les environs
immédiats. Quelques animateurs dont je suis vont s’offrir leur
premier café italien : le cappucino recueille une majorité des
suffrages, suivi du « longo » et je dois être le seul à
avoir opté pour un expresso, bien serré au fond de ma tasse…
Nous quittons S. Giovanni
in Laterano pour rejoindre la Rome antique, la Rome romaine de nos
versions latines, avec la découverte guidée du Forum et de ses
restes prestigieux. Nous nous rassemblons au pied de l’arc de
Constantin, à deux pas de l’énorme silhouette du Colosseo. Nous
faisons une première tentative pour pénétrer dans le Forum mais
nous arrivons par… l’uscita. Demi-tour. Nous contournons la
longue clôture et arrivons à l’entrée : celle-ci est payante, ce
dont aucun des « anciens » du pélé n’avait le
souvenir et pour cause : c’est une nouveauté. Après une
négociation laborieuse à la caisse, dans un mélange d’italien
d’opérette et de mauvais anglais, nous obtenons 60 tickets
gratuits pour les jeunes, 6 autres pour les accompagnateurs et 6
tickets payants. Une bonne nouvelle quand même : avec ce ticket
nous pourrons visiter aussi le Colisée, ce qui n’était pas prévu
au programme initial.
L’exploration du Forum
commence, guidée par le jeu-découverte préparé par Xavier.
Questions, énigmes à résoudre, inscriptions latines à comprendre
sinon traduire ponctuent les étapes de notre visite. Les Romains
étaient vraiment d’immenses bâtisseurs, du moins leurs esclaves
et il y en a de « beaux restes » sur le Forum que nous
parcourons en tout sens. Colonnes, temple à Vesta, « basilique »,
arc votif, chaque ruine y passe et chaque monument « à clé »
est décrypté. Un bref commentaire de notre livret du pèlerin en
éclaire le nom, l’origine et la destination. Seule la fameuse
« louve romaine » nous échappe : nous apprendrons
un autre jour qu’il nous aurait fallu ressortir du Forum pour la
croiser.
Nous décidons d’aller
visiter le Colisée puisque notre ticket d’entrée au Forum nous y
donne accès. Visite de ce qui est sans doute le monument le plus
impressionnant de la Rome antique (avec les thermes de Caracalla, que
nous ne verrons pas). La vue plongeante sur l’arène et son
sous-sol donne une bonne idée de la Rome qui vivait et vibrait, deux
millénaires auparavant, du « pain et des jeux », le
fameux « panem et circenses » qui semble toujours
satisfaire l’homme du XXIème siècle.
Nous retrouvons les cars
stationnés là où ils nous avaient laissé le matin. Nous sommes un
peu en avance et Claire et moi en profitons pour faire une balade
dans le parc de la villa Celimontana, jusqu’à la petite église
SS.Giovani e Paolo.
Ce soir, c’est
« veillée Sichem ». Il s’agit d’un jeu de
questions-réponses, concocté par l’équipe des 4ème –
3ème où saint Pierre, le Vatican et les Papes se
partagent la vedette. « Ils » ont heureusement oublié
depuis longtemps et les questions et les réponses, mais pour
respecter un semblant d’égalité, nous avons mêlé les
(soi-disant) « experts » de Sichem avec les
(présumés) « innocents » de Kephas. Une tablée
d’anciens participe au jeu. Je suis chargé de l’animation et
c’est une joyeuse foire : je dois hurler pour me faire
entendre mais j’y arrive à peu près. L’enjeu d’une éventuelle
compétition se perd rapidement dans le tumulte engendré par les
cris, les protestations et les fous rires. Une seule équipe ratera
une question et sera donc déclarée… vainqueur. J’avais encore
assez de questions pour durer jusqu’à minuit, mais au bout d’une
demi-heure, il est temps d’arrêter le massacre.
Xavier lance alors sa
présentation de la Pieta, au son du Coronation Anthem de Haendel.
Les admirables photos de Robert Hupka surgissent du noir et blanc, se
répondent ou se mêlent pour mieux se fondre dans la nuit. Elles
continueront à tournoyer dans nos esprits habités par cette vision
étrange et tendre d’une mère éternellement jeune et de son grand
fils, paisiblement abandonné sur ses genoux.
Olivier, très en verve,
sûrement inspiré par ce que nous venons de voir, enchaîne un long
commentaire sur celle qui, depuis le concile d’Ephèse en 431,
a été déclarée « Mère de Dieu », θεοτοκος, et à qui les ciseaux de Michel-Ange ont quasiment donné l’âge de
son Fils. Son exhortation déborde au point que Gilbert, dont c’était
le tour ce soir-là, doit abréger la sienne. Un « Notre Père »
paumes tournées vers le ciel conclut la soirée. Il est suivi de la
traditionnelle bénédiction vespérale.
Mercredi 16 avril :
la confirmation.
Nous devons être à
Saint-Pierre à 8 h ! Ce matin-là, les téléphones sonnent
donc dans les chambres à 6 h. Les autocars se faufilent dans une
Rome pas encore trop encombrée et déjà ensoleillée. Nous roulons
le long du Tibre, apercevant l’île Tiberine qui rappelle l’île
de la Cité à Paris, franchissons le fleuve devant le château
St-Ange et nous arrêtons face à Saint-Pierre, sur la via della
Conciliazione. Le ciel est bleu, le soleil illumine la place
Saint-Pierre et ses fameuses colonnades. Nous franchissons sans
encombre les portiques de détection qui donnent accès à la
basilique. Tout est tellement proportionné dans Saint-Pierre qu’on
en oublierait presque qu’on se trouve dans la plus grande église
de la chrétienté. Des repères au sol rappellent toutefois que
Notre-Dame de Paris ou notre cathédrale Saint-Croix d’Orléans
tiendraient facilement dans la nef centrale… Nous nous rendons
immédiatement à l’un des sept autels latéraux pour célébrer
l’eucharistie. Nous réalisons à peine que nous sommes en train de
vivre la messe à deux pas du tombeau de Saint-Pierre. Notre chant
semble emplir la basilique et un jeune bedeau italien vient à
plusieurs reprises calmer la sono des Francese… Le prêche de
Richard s’envole vers les voûtes. Les confirmés et les futurs
confirmands seront successivement appelés pour recevoir une
bénédiction spéciale de la part des concélébrants. A la fin de
l’office, Olivier quitte son vêtement liturgique pour reprendre sa
casquette de guide. La basilique s’est emplie de touristes et de
pèlerins. Nous nous faufilons dans la crypte qui abrite les tombeaux
des papes. La tombe de Jean-Paul II fait l’objet d’une dévotion
particulière et une religieuse veille, telle une antique vestale que
le défilé des pèlerins, déjà dense, laisse de marbre. Nous
remontons dans la basilique en suivant le sens giratoire qui nous
fait repasser par l’extérieur de l’édifice. Olivier reprend
l’histoire à ses débuts, le martyre de Pierre, sous Néron, dans
le cirque tout proche, dont ne subsiste plus comme trace que
l’obélisque déplacé et dressé au milieu de la place
Saint-Pierre sur l’ordre de Sixte Quint. Puis la construction, le
dôme œuvre de Michel-Ange et peut-être inspiré de celui de
Florence que nous entreverrons au loin, au retour. Une chasse vitrée
expose curieusement à la vue de tous une dépouille cireuse de Jean
XXIII. Est-ce lui, est-ce son double façon musée Grévin ?
Troublant et pas vraiment nécessaire pour le pape qui voulut Vatican
II. La statuaire est par ailleurs très riche. Nous nous arrêtons
devant la comtesse Mathilde de Toscane, la première femme ensevelie
dans la basilique. C’est elle qui fut l’organisatrice de la
célèbre rencontre de Canossa au cours de laquelle l’empereur
Henri V dut demander pardon au pape Grégoire VII, qui l’avait
excommunié (déliant ainsi ses sujets du devoir de lui payer
l’impôt !). L’empereur ne tarda pas à se venger de cette
humiliation ! Un peu plus loin, une foule est agglutinée devant
la vitre qui protège la Pieta de Michel-Ange, depuis qu’un fou a
voulu la démolir à coups de marteau : elle semble toute
petite, au loin, perdue, solitaire. Heureusement, nous l’avons vue
de près la veille, photographiée sous tous les angles dans le
montage préparé par Xavier :
Je fais un petit saut à
la Poste vaticane pour expédier mes cartes, avec des timbres
colorés, un vitrail à l’effigie de Sainte Elisabeth de Hongrie.
De notre point de rendez-vous, l’obélisque, nous partons à
l’assaut des musées du Vatican. Il nous faut pour cela longer pour
la contourner la longue et haute muraille de brique qui ceinture le
Vatican. Dans l’entrée du musée où nous patientons en attendant
qu’Olivier achète les tickets, trône une étrange statue moderne,
un bloc de marbre blanc d’où se détache un jeune homme à
l’allure de Petit Prince monté en graine, poussé en avant (ou
retenu ?) par Jean Paul II, sans doute quelque allégorie dont
le sens m’échappe. Nous nous fixons des objectifs limités : voir
les « chambres » de Raphaël et la chapelle Sixtine, et
un rendez-vous à 13 h 30 à la sortie. Nous partons en petits
groupes mais après la longue galerie des cartes géographiques
anciennes, qui mène aux stanze di Raffaelo, nous serons
progressivement dispersés par la foule. Je me retrouve bientôt seul
(si je peux dire !) pour contempler L’école d’Athènes,
la fameuse fresque où l’on voit côte à côte Platon, le doigt
levé vers le ciel des Idées et Aristote désignant au contraire le
sol des réalités sensibles… Un peu plus loin, la chapelle Sixtine
est également pleine comme un œuf, avec des gardiens italiens qui
brament de temps en temps une consigne en italien pour interdire de
s’asseoir ou de prendre des photographies. En fait, il faudrait
visiter la chapelle Sixtine avec des jumelles car les peintures
originales qu’on a l’habitude de voir en reproduction, agrandies,
sont tout là-haut, à 20 m au-dessus de nos têtes, là où le doigt
de Dieu tendu vers celui d’Adam paraît bien minuscule ! La
seule chose qui se donne bien, gigantesque, folle, c’est le
Jugement dernier qui occupe tout le mur ouest, derrière l’autel :
pas besoin de se tordre le cou pour détailler les élus et les
damnés. Un pape pudibond ou obsédé, mû par la Contre-Réforme,
ordonna de voiler les nudités les plus voyantes. Ça donne, sur une
trentaine de beaux mâles et femelles une sorte de limace noire en
guise de cache-sexe, pas très esthétique. Comme quoi, les plus
grandes œuvres d’art ne sont pas à l’abri des caprices des
princes de ce monde ou des retournements de l’Histoire. Pour
terminer cette visite au pas de charge, je passe par la salle
égyptienne, entrevoyant une impressionnante momie présentée dans
son sarcophage, telle que les archéologues ont dû la découvrir,
noire et décharnée. En ressortant du musée, je suis bon dernier –
il n’est pourtant que 13 h 15 -et je rends grâce à Gilbert qui
s’est dévoué pour m’attendre. Nous reprenons le chemin en sens
inverse, vers Saint-Pierre. Cet axe touristique privilégié s’est
couvert entre temps de Sénégalais qui proposent, tous les trois
mètres, des sacs Prada, Vuitton, Dolce&Gabbana, etc. tous les
mêmes, garantis d’origine...
Lorsque nous arrivons à
nouveau sur la place Saint-Pierre, Kephas et Sichem ont déjà
déballé les pique-niques. Nous nous installons sur les marches,
plein soleil, plein sud. Beaucoup y gagneront quelques couleurs, cet
après-midi-là.
Après le repas, nous
partons à l’assaut du Janicule, par des petites rues où nous nous
perdons un moment. L’effort de la montée en vaut la peine. Le
passaggiata del Gianicolo, bordé de bustes de garibaldiens, dressés
à l’ombre d’immenses pins parasols, offre une vue superbe sur
Rome. Olivier nous en fait identifier au loin les principaux
monuments. Nous arrivons alors à l’immense statue équestre de
Garibaldi : le héros révolutionnaire italien tourne la tête,
paraît-il, vers le Vatican, son ennemi. Nous poursuivons notre route
jusqu’à l’église San Pietro in Montorio. Nous sommes chez les
Espagnols. Olivier nous montre un « tempietto », petit
temple circulaire coiffé d’un dôme, œuvre de l’architecte
Bramante, et maquette anticipatrice de la coupole de Saint-Pierre. De
là, nous empruntons un escalier qui descend directement dans le
Trastevere, jusqu’à la piazza S. Maria in Trastevere. Ceux qui ont
encore du courage, jettent un œil aux superbes mosaïques du chœur
de l’église, mais tous ou presque vont surtout aller faire la
queue chez le glacier de la place pour manger leur première gelato
italienne. Les marches d’une fontaine accueillent les pèlerins
fatigués pour une pause bien méritée. Puis nous nous rendons au
lieu de rendez-vous avec les autocars, que nous attendrons une bonne
demi-heure, pris qu’ils sont dans la circulation romaine de 18 h.
Ce soir-là, nous battrons le record de vitesse de montée en car. Il
faut savoir qu’en Italie, les autocars, semble-t-il, n’ont pas le
droit de s’arrêter. Ou si peu…
Veillée Képhas. C’est
le jeu de la « juste date », à choisir entre trois pour
toute une série d’événements de l’Histoire romaine et
chrétienne. Là aussi, bonne ambiance, malgré la fatigue du jour.
Comme chaque soir, nous prions ensemble pour conclure notre journée
de pèlerin.
Jeudi 17 avril :
l’eucharistie.
Jour de repos pour nos
chauffeurs. Nous prenons pour la première fois le métro romain de
bon matin. Cinq stations de Basilica San Paolo jusqu’à Colosseo.
De là, notre petite troupe chemine dans la ville, passant devant
« la machine à écrire » - c’est ainsi que les
Italiens surnomment l’énorme monument blanc dressé en l’honneur
de Victor Emmanuel II – puis s’enfile dans les petites rues qui
mènent jusqu’à Saint-Louis-des-Français. Nous sommes accueillis
par le recteur, à 9 h 30, avant l’ouverture des portes de l’église
aux fidèles. Nous foulons la poussière des morts, nous rappelle le
recteur, tandis que toute l’architecture et la décoration
intérieure, piliers carrés et voûtes en plein cintre, plafonds à
caissons richement dorés, placages en loupe de marbre, nous attirent
vers le Ciel et ses trésors. Outre qu’elle est un petit bout de
France en Italie, admirablement entretenue, du moins à l’intérieur,
Saint-Louis renferme un grand trésor dans une de ses chapelles
latérales. Trois immenses et sublimes Caravage, peints sur place et
qui n’ont quasiment jamais quitté ce lieu, nous attendent.
La vocation de saint Matthieu…
…Saint Matthieu et
l’ange…
… Le martyre de Saint
Matthieu.
Suit un commentaire
simple et spirituel du recteur, sur l’ombre et la lumière chez
Caravage dans ces trois tableaux. Les ados écoutent le recteur,
regardent les tableaux, subjugués ou saturés. Certains ont renoncé
tout de suite et se sont assis sur une marche d’autel ou restent
adossés à un pilier, prolongeant leur nuit ou se protégeant comme
ils peuvent de ce doux déluge d’Art et d’Histoire,
malheureusement troublé par un organiste qui semble-t-il règle ou
accorde bruyamment son instrument.
Sortis de là, éblouis
pour certains, accablés pour d’autres, nous partons par équipe à
la découverte de la Rome baroque. Pour cela, il faut savoir où
aller. Deux petits tubes remplis de pâtes dans lesquelles Xavier a
glissé quelques vermicelles en forme de lettres vont fournir les
premiers indices. Pour Capitole, Constance et Ivanne les ont étalées
sur le parvis et résolvent l’énigme de départ : « Chiesa
del Gesù » sera notre première destination. Commence une
longue errance dans Rome qui passera par la fontaine de Trevi, le
Quirinale, de nombreuses églises, le Panthéon et sa splendide voûte
(43,50 de diamètre !), les glaces chez Giolitti, et pour
terminer en beauté, l’eucharistie célébrée dans la chapelle du
Séminaire français de Rome. Pour certaines églises, il nous faudra
faire preuve d’imagination : elles sont quasiment toutes
fermées entre 13 h et 15 h et le Guide vert nous sera précieux pour
résoudre certains énigmes posées par Xavier dans son jeu.
Après des kilomètres
dans Rome parcourue en tout sens, c’est le frère de Claire Urfels, le père Florent Urfels, qui nous accueille au Séminaire pontifical français. Le chœur de
la chapelle est décoré d’une très belle mosaïque moderne. La
messe sera recueillie. Il faut dire que nous sommes un peu « cuits ».
Nous repartons vers le métro du matin pour revenir à San Paolo.
Derrière le forum, nous croisons la fameuse louve romaine, discrète
statue de bronze qui, présentement, émerge à peine de la façade
d’un immeuble en ravalement. Beaucoup, d’ailleurs, passeront
devant sans la voir.
La veillée est organisée
par Kephas qui nous propose un spectacle « son et lumière »
sur les tribulations de Saint Paul autour du bassin méditerranéen
telles qu’elles sont rapportées par les Actes des Apôtres. Il y a
tout, même les éléments déchaînés sur la mer Méditerranée.
Vendredi 18 avril 2008 : la réconciliation
Nous partons vers 9 h
pour les catacombes. Après quelques détours, car une voie d’accès
indiquée sur le plan est fermé, nous entrons dans le domaine de
Saint Calixte. D’un seul coup, comme par enchantement, nous sommes
passés de la ville à la campagne et l’autocar roule lentement sur
une petite route bordée de prés très verts. Il y a eu un orage
dans la nuit sur Rome et ses environs. Débarqués sur un parking
encore vide, nous nous rendons dans une petite salle où un guide
entame ses explications. Il a à ses côtés un meuble contenant de
grands panneaux verticaux qu’il tire au fil de son exposé et qui
présentent tantôt une coupe du terrain, tantôt les symboles
utilisés par les premiers chrétiens, la colombe, l’agneau, le
poisson, le dauphin, etc. Contrairement à ce qui se passe quand on
fait des fouilles, les tombes les plus récentes sont les plus
profondes, soulignera Olivier. Il y a trois ou quatre niveaux,
jusqu’à – 25 m. Quand le guide a commencé à parler chacun
s’est charitablement gardé de se tourner vers son voisin pour
réclamer la version sous-titrée : il a pourtant un accent à
couper au couteau (allemand, polonais ?), couteau avec lequel il
torture et découpe curieusement la phrase française. Il faut
s’accrocher pour suivre. Je me contiens pour ne pas exploser de
rire. Heureusement, le sujet m’y aide. Curieusement, au bout de
quelques minutes, l’oreille s’habitue, comme si un décodeur
s’était mis en route automatiquement.
Après cet exposé
liminaire, nous plongeons dans les catacombes à la suite de notre
guide, par un escalier de pierre un peu raide. Il règne une humidité
impressionnante, qui ronge d’ailleurs les fresques, dont seuls les
rouges et les ocres restent encore visibles. Les catacombes, ce sont
de longs couloirs - vingt kilomètres de labyrinthe à St Callixte -
dont les murs sont trouées de niches horizontales où les morts
étaient déposés, recouverts de chaux vive et drapés dans un
linceul. Une plaque de marbre fermait le tout. Les plaques de marbres
ont toutes été cassées et il ne reste plus que les alvéoles, plus
ou moins longues. Mortalité infantile oblige, près de la moitié
des tombes creusées dans les murs de tuffeau sont celles d’enfants
ou de bébés ! A intervalles réguliers, une petite
anfractuosité marque la place où était déposée la lampe à
huile, seul éclairage de l’époque. Contrairement aux catacombes
parisiennes, il n’y a plus aucun ossement visible, l’église de
Sainte Praxède en ayant accueilli beaucoup au moment de sa
construction et le reste étant protégé des visiteurs. De temps en
temps, on entrevoit une pièce où les vivants déjeunaient paraît-il
en compagnie des morts, repas dénommé refrigerium (sic).
Aujourd’hui, il y a de loin en loin un autel portatif où des
petits groupes de pèlerins célèbrent la messe comme au temps des
premiers chrétiens, si bien convoqués par ces lieux. Olivier nous a
indiqué que contrairement à la légende, les catacombes n’étaient
pas un lieu de refuge où les chrétiens persécutés se cachaient.
Le pouvoir connaissait parfaitement l’existence de ces
« cimetières » qui n’étaient pas non plus un
exclusivité chrétienne : on a retrouvé des catacombes
judaïques.
Au détour d’un
couloir, une salle plus grande, la crypte de Sainte Cécile, abrite
la reproduction d’une émouvante statue due à Stefano Maderno,
dont l’original se trouve dans l’église dédiée à la sainte.
Celle-ci gît à demi-retournée sur le ventre, les doigts des deux
mains formant le symbole de la Trinité. Dans cette position, elle
pourrait sembler somnoler mais une fine cicatrice encercle son cou :
la marque de la décapitation de cette jeune fille d’une noble
famille romaine, qui accompagnait les chrétiens dans leur martyre.
Jusqu’à le vivre elle-même.
Lorsque nous remontons à
la surface, un beau soleil éclaire la campagne romaine. Notre groupe
se pose sur une prairie ceinte d’un rempart de verdure d’où
émergent quelques cyprès, gardiens de la tranquillité du lieu.
Olivier introduit notre célébration de la réconciliation. Gilbert,
Richard et lui vont se disposer un peu à l’écart pour confesser
les jeunes – et les adultes – qui le désirent. Il y a une
attente paisible et un à un, les pénitents se lèvent et vont voir
les prêtres. Olivier prend chacun par l’épaule, comme pour mieux
assurer l’intimité et la confidentialité de l’aveu et du
pardon. L’absolution est donnée d’un signe de croix. On devine
comme dans l’Evangile de la pécheresse pardonnée le « Va en
paix et ne pèche plus », délivré ici mains posées sur la
tête ou sur les épaules. Chacun peut être spectateur de cette
démarche si personnelle accomplie par l’autre mais il n’y a nul
voyeurisme car sur toute cette scène, « il fait Dieu »,
de cette météo imprévisible et sans nuages qui surgit parfois là
où deux ou trois sont réunis en son Nom. Ceux qui ne se confessent
pas échangent par petits groupes, en parlant à voix basse. Moment
de grâce dans ce pèlerinage, dont beaucoup – tous sans doute,
chacun à sa manière - surent profiter.
Les cars vont nous
emmener jusqu’à la piazza del Popolo pour nous lâcher dans Rome.
C’est l’après-midi « quartier libre ». Auparavant,
nous pique-niquons sur les hauteurs boisées du Pincio. Nous tombons
à la fin du repas sur une dame-pipi qui vient d’inventer une
réglementation nouvelle : « ses » toilettes
n’accueillent que les adultes, en vertu de quoi les « bambini »
(sic) sont priés de rejoindre d’autres lieux à eux destinés.
Rassemblés au pied de
l’obélisque (encore un !) où nous nous donnons rendez-vous
pour 16 h 45, nous hésitons un moment sur la configuration à
adopter : équipe, pas équipe ? Un petit groupe de Sichem
a envie de manger un pizza romaine, pour ne pas repartir idiot :
ce projet en fédère quelques uns que Claire et moi accompagnons.
Les autres suivent Xavier, Françoise, Marie-Agnès, Gilbert à
la recherche des souvenirs et des cadeaux à rapporter.
Nous redescendons le
Corso à la recherche d’une pizzeria. Le frère de Claire lui a
parlé d’une excellent établissement du côté de la piazza
Navona. Malheureusement, quand nous arrivons vers 15 h, le service
est terminé. Nous nous rabattons sur une pizzeria al taglio, où
l’on sert la pizza en quarts que nous mangeons dehors, debout ou
tassés sur deux bancs de jardin en plastique blanc. Mission
accomplie. Nous continuons notre balade et entrons dans quelques
magasins de souvenirs pour trouver l’objet qui va plaire. Je fais
un saut à Saint-Louis-des-Français pour acheter un poster d’un
des Caravage que nous avons découverts hier. Nous passons aussi par
un petit supermarché. Nous finirons par rallier la piazza del Popolo
non sans avoir fait un crochet par la splendide Galeria Alberto
Sordi, en forme de V et qui donne sur le Corso. En dehors de ses
boutiques de luxe, les mêmes que dans toutes les grandes villes
européennes, elle présente l’intérêt fondamental d’abriter
une des rares toilettes publiques de Rome, que j’ai repérée la
veille *.
Au retour, je devance le groupe avec Marc pour avoir le temps de voir
deux autres Caravage qu’abrite l’église S. Maria del Popolo :
La conversion de Saint-Paul et La crucifixion de Pierre.
Coincées qu’elles sont, face à face dans le chœur d’une petite
chapelle latérale, il faut se tordre le cou pour apercevoir les
toiles, superbes là aussi. Sur la piazza, un podium de concert est
en cours d’installation. Les essais de sono font vibrer la petite
église.
Le soir, avant chaque
repas, un petit apéro entre adultes du pélé et animateurs s’est
organisé depuis le début de la semaine. Pour le dernier, nous
sommes encore plus nombreux. Invariablement, chaque repas aura
commencé par un plat de pasta : succès assuré chez les ados,
qui compense les sandwiches du midi dont la cote n’a cessé de
décroître tout au long de la semaine.
C’est notre dernière
veillée, confiée à Sichem. Claire a demandé à chacun de faire un
dessin, un poème, bref de laisser une trace de son passage à Rome.
Appel entendu. Avec Claire et Marie-Agnès qui nous rejoint, nous
assemblons toutes les feuilles recueillies le long d’une ficelle,
comme un rappel du linge qui sèche, pendu d’une façade à
l’autre, dans les rues étroites de la Rome populaire. Nous
organisons le défilé de cet étendage insolite avec quelques
jeunes, pendant que Claire égrène les thèmes ou les phrases
laissées par chacun. En prélude à la journée du lendemain,
consacrée aux vocations, à travers les sacrements de l’ordre et
du mariage, nous projetons un montage sur les vocations qui fait
défiler une succession de témoins qui se sont levés à l’appel
de Dieu tout au long de l’Histoire du Salut, d’Abraham jusqu’à
nous. « Et toi ? ». Comme à la fin de chaque
veillée, une courte exhortation, un Notre Père et une bénédiction
conclut la veillée. Assortie des traditionnelles (et fermes)
recommandations d’Olivier en vue d’une (dernière) nuit calme…
Samedi 19 avril
Dernier jour, déjà.
Nous montons nos bagages dans les cars et nous reprenons le métro.
Nous descendons à Termini, la gare centrale de Rome, modernisée et
rebaptisée « Jean Paul II » et marchons jusqu’à notre
avant-dernière église, quatrième basilique majeure,
Saint-Marie-Majeure. L’Histoire l’a curieusement sertie entre des
immeubles. On raconte que la première église du nom fut construite
là, sur l’Esquilin, parce qu’il avait neigé le 5 août 356 à
cet endroit et que cette neige avait été interprétée comme une
circonstance miraculeuse, un signe virginal du ciel. Après cette
visite, rapide en dépit des splendides mosaïques, nous sommes
sollicités pour la traditionnelle photo de groupe, par un
photographe « agréé par le Vatican » (hum !). Il
nous donne rendez-vous en début d’après-midi pour nous remettre
autant d’exemplaires que nous voudrons de LA photo du pélé…Il
tiendra promesse et pour la modique somme de 6 euros, chacun pourra
emporter ce souvenir de Rome, de bonne qualité ma foi.
Nous nous rendons ensuite
à S. Prassede où nous allons célébrer notre dernière messe
romaine. Cette fois, nous occupons la nef et l’église est tout
entière à nous. Nous sommes à nouveau face à une merveilleuse
mosaïque du IXème siècle, qui occupe toute l’abside. Deux
palmiers y symbolisent les deux Testaments, et sur l’un deux, un
phénix est perché, signe de la résurrection. Des mosaïques, il y
en a aussi dans une chapelle latérale, dédiée à Saint Zénon, qui
abrite une « colonne de la flagellation », à laquelle,
selon la tradition, Jésus aurait été attaché pour être fouetté
devant Pilate. Cette colonne est particulièrement vénérée par les
Italiens pendant la Semaine sainte.
En sortant, nous trouvons
une sorte de parc, tout proche, pour apprécier notre dernier et
invariable pique-nique. Frédérique a la bonne idée de faire
tourner une bouteille de vin. A croire qu’elle a fait suivre sa
cave à Rome. Excellent Médoc qui améliore l’ordinaire des
« monos » comme on nous appelle parfois. Puis c’est
l’heure du rendez-vous ultime avec les autocars. Nous les
attendrons une bonne demi-heure, en plein soleil, dernière occasion
de bronzer. Il fait 25°, cet après-midi-là à Rome et, au
démarrage, Claire me confie qu’elle serait bien restée une
semaine supplémentaire… ! Elle n’est sans doute pas la
seule dans ces dispositions nostalgiques.
Et c’est le long tunnel
du retour, qui me paraîtra cependant moins long qu’à l’aller.
Pourtant, nous devrons stationner une heure et demie à l’entrée
du tunnel du Fréjus : nous sommes tombés le soir où ils
changent les ampoules ! Après la nuit, il y a encore quelques
belles énergies pour chanter. Nous ferons même plusieurs canons,
incluant la partie avant du car (i.e. les « anciens »).
Le chauffeur nous fera simplement savoir qu’il a une chose en
horreur : les concours de hurlement entre les deux travées du
car. Nous n’insisterons pas. Qui veut voyager loin, ménage son
cocher. Et, au retour de Rome, tous les chemins ne mènent peut-être
pas à Orléans, même si notre ville doit son nom à la Via Aurelia
qui en vient… Nous arrivons dimanche à 12 h 30, sous le même
temps maussade qu’au départ mais chacun est plein d’images, de
souvenirs et les visages apportent à ceux qui sont restés quelques
rayons du soleil romain. Il faut se séparer pourtant. Mais personne,
je pense, n’oubliera cette semaine passée ensemble, au nom du
Père, du Fils et du Saint-Esprit… Amen !
Pierre-Michel Robert
30 avril
2008